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La Stérilisation d’hier à aujourd’hui.

, 07:25

Les aperçus historiques sur la stérilisation -d'autant plus quand ils évoquent des souvenirs personnels- sont suffisamment rares pour que nous ne résistions pas au plaisir de vous faire partager ces témoignages :
(source : http://forumed.sante-dz.org/showthread.php?t=16344)

"La Stérilisation d’hier à aujourd’hui.


En Mars 1965, à l’Hôtel-Dieu: seuls le Bloc Opératoire et la salle d’urgence étaient équipés d’un Poupinel et d’un autoclave à vapeur d’eau pour la stérilisation des instruments de chirurgie, des sarraus de Chirurgien et des champs opératoires. La prise en compte des règles d’asepsie faisait déjà partie des préoccupations des Chirurgiens et des équipes soignantes. Par contre, la stérilisation des dispositifs utilisés pour les soins Infirmiers dans les services n’était pas encore une pratique très courante ni reconnue alors comme impérieuse, exception faite des quelques dispositifs invasifs : aiguilles à ponction lombaire, à ponction d’ascite ou pleurale pour lesquels l’asepsie était déjà de règle. • Les plateaux émaillés, les quelques pinces et ciseaux étaient uniquement flambés à l’alcool à brûler juste avant utilisation. L’apprentissage de cette pratique n’était pas sans risque : quel élève Infirmier(e) débutant(e) n’a pas un jour déclenché l’affolement du service pour avoir oublié un flacon d’éther à proximité du lieu de flambage ou ne s’est pas brûlé les doigts pour avoir trop mis d’alcool à brûler dans le plateau ?.. ou n’a pas reçu les foudres du Médecin pour lui avoir donné à la pince à servir un instrument encore brûlant ! • Les 2 seules seringues de 20 ml du service trempaient à demeure avec les aiguilles dans un grand bol d’alcool à 90°. Pratiquer une injection intramusculaire consistait d’abord à bien désinfecter la seringue en aspirant plusieurs fois l’alcool contenu dans le bol et ensuite, à la rincer intérieurement avec de l’eau qui n’avait de stérile que le nom : eau bouillie conservée dans un flacon en verre (quand ce n’était pas du grès) dans lequel plongeait un grand trocart en acier pour y adapter la seringue, le tout recouvert d’un tampon de coton cardé pour préserver l’ensemble des poussières. La difficulté consistait ensuite à récupérer l’aiguille au fond du bol d’alcool sans se piquer les doigts. Souvent, le peu d’alcool contenu dans l’aiguille réagissait avec le médicament qui, soit changeait de couleur, soit précipitait et devenait très visqueux au point de plus pouvoir être injecté au travers de l’aiguille. L’injection réalisée, la seringue et l’aiguille étaient rincées à l’eau claire sous le robinet avant d’être mises à nouveau à tremper dans l’alcool. • Les aiguilles à injection ou prises de sang étaient bien sûr réutilisables et perdaient, au fur et à mesure de leurs utilisations leur pouvoir piquant. Le réaffutage sur la pierre à huile était de tradition confié au bricoleur le plus minutieux du service. • Les tubulures à perfusion en caoutchouc rouge et leur compte-gouttes en verre, de même que les tubulures à lavement en caoutchouc noir étaient mis à bouillir dans l’eau : pas ensemble bien-sûr, mais successivement… dans la même casserole, où elles étaient parfois oubliées : c’était l’odeur de caoutchouc brûlé qui nous signalait alors la fin du traitement ! • Les sondes urinaires en caoutchouc rouge étaient stockées dans des boîtes à gâteau puis trempées quelques secondes dans l’alcool et égouttées sommairement avant cathétérisme. Après dépose, elles étaient lavées au savon de Marseille puis mise à sécher, avant de rejoindre à nouveau la boîte à gâteau. • Les compresses et les bandes de gaze étaient fabriquées par les personnels de nuit à partir de gros rouleaux de pièces de gaze découpés puis pliés ou roulés selon des formats très personnels. Les compresses étaient ensuite minutieusement rangées en éventail dans des boîtes de lait en poudre en aluminium puis confiées au bloc opératoire ou au service des urgences pour être stérilisées, récipient fermé oblige : …au Poupinel ! Point besoin alors de témoin de passage à la stérilisation : le jaunissement et parfois pire des compresses attestait à lui seul qu’elles avaient bien subies l’indispensable traitement. • Les patins (entendez par là les pansements américains), étaient eux aussi confectionnés la nuit à partir de pièces de gaze, de coton hydrophile et de coton cardé. Conditionnés dans des tambours à éclisse récupérés dans les réformes du bloc, ils étaient ensuite stérilisés par autoclave à vapeur d’eau au Bloc Opératoire ou en salle d’urgences. • Les boules de coton étaient roulées manuellement à partir de coton hydrophile non dépeluché présenté en ballots : tâche souvent dévolue au moins ancien dans le grade le moins élevé, qui l’assurait d’office d’une séance d’éternuements et tâche particulièrement redoutable pour les barbus qui prenaient bien vite l’allure du Père Noël. En Juin 1965 , une première campagne de sensibilisation à l’hygiène provoqua une révolution dans ces pratiques : • Fini la trempette des seringues et des aiguilles dans le bol d’alcool : elles devaient subir obligatoirement la stérilisation par Poupinel entre chaque utilisation.

B.M.N Étudiant(e) en Médecine

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 Re : La Stérilisation d’hier à aujourd’hui.

• Bonjour les boîtes de seringues : chaque équipe avait sa boîte : boîte pour l’équipe de matin, pour l’équipe d’après midi et pour l’équipe de nuit. La réalisation de ces boîtes de seringues relevait à chaque fois de l’exploit : les seringues mises à bouillir devaient être réassemblées, et, en l’absence de repère entre le corps de seringue et le piston, ce n’est qu’après de multiples tâtonnements qu’elles étaient enfin appareillées. Le corps et le piston étaient ensuite désassemblés, placés tête bêche et enroulés dans une pièce de gaze. L’organisation de la boîte se faisait par couches successives : une couche de coton, une couche de seringue etc…comme une tartiflette, avec la volonté de bien capitonner les seringues pour surtout ne pas les casser…sans savoir que ce capitonnage nuisait à la conductivité de la chaleur. • Bonjour les boîtes d’aiguilles : toutes les catégories d’aiguilles étaient soigneusement rangées dans la boîte sur une tôle multiperforée qui faisait office de chevalet de rangement et de classification. • Et bonjour les dégâts : l’absence de normalisation de la conicité entre les seringues et les aiguilles nous imposait l’utilisation de tout petits embouts intermédiaires corrigeant les différences de diamètre. Ces embouts, impossibles à prendre et à adapter sur la seringue avec une pince à servir (trempant dans l’alcool) nous ont valu bien des explorations à 4 pattes sous les lits pour les récupérer. Mais plus question de réclamer autre chose : l’achat de toutes ces boîtes et seringues en verre avait largement dépassé les crédits habituellement accordés au service pour ses besoins annuels en petit matériel. Dire qu’il y avait négligence à appliquer de telles procédures : je dirai non puisque chacun le faisait avec la volonté de bien faire, selon les pratiques communes aux établissements de soins de l’époque : époque héroïque où 10.000 unités de Pénicilline par jour étaient une posologie considérée comme largement suffisante pour traiter presque tout type d’infection sévère. Dire qu’il y avait de l’infection : avec le recul oui bien sûr mais pour l’époque, l’abcès de la fesse après piqûre faisait partie du " décor " : trois fois par semaine l’interne du service des urgences incisait les abcès : chacun des trois secteurs d’hospitalisation avait " droit " à une incision sans rendez-vous préalable. Lequel choisir ? c’est la Religieuse du service qui, après les avoir tous tâté du bout du doigt choisissait le " plus mûr " et gérait les priorités. 1969 à 1972 fut une période fertile en changements, y compris en matière de lutte contre les infections nosocomiales : - d’une part : le développement de la chirurgie orthopédique, la chirurgie de plus en plus invasive, l’accroissement du nombre de malades allergiques à la Pénicilline et l’apparition de souches de plus en plus résistantes aux antibiotiques ont obligé les soignants et les praticiens à prendre encore plus en compte les mesures d’hygiène élémentaires. - d’autre part : les progrès réalisés dans la plasturgie, la vulgarisation de l’oxyde d’éthylène et des rayonnements ionisants pour stériliser à basse température les matériaux thermosensibles ont permis aux Laboratoires Pharmaceutiques de nous proposer des dispositifs stériles jetables jusqu’alors impossibles à stériliser par les procédés faisant appel à la chaleur. Les ligatures chirurgicales (catgut, crin, nylon, soie tressée) jusqu’alors achetées en bobine de grande longueur, dont les restes étaient précieusement conservés entre deux interventions dans un bocal d’alcool pour être utilisés jusqu’au dernier centimètre, ont été très rapidement remplacées par des ligatures plus courtes déjà serties sur des aiguilles. Les gants de chirurgien, en caoutchouc épais, lavés et talqués entre chaque intervention voire rapiécés par des rustines en cas de perméabilité ont été abandonnés au profit du gants de chirurgie en latex à usage unique. Les sondes à demeure, les tubulures de perfusion et les drains en caoutchouc ne devaient plus être réutilisés d’un malade à l’autre. Pour mieux satisfaire les exigences de sécurité au niveau asepsie : le flambage des plateaux et des pinces fut abandonné et la stérilisation fut centralisée pour tous les services de Chirurgie, la Radiologie, les Urgences, les Consultations Chirurgicales et plus tard la Réanimation. Dans un local de 20 m2 à peine, un autoclave de dernière génération fut implanté et le local aménagé pour permettre, avec le concours de trois Aides-soignantes, la fabrication des sets de soins prêts à l’emploi sous emballage papier. Pour faciliter la tâche des soignants, la prestation de cette unité a été étendue à la distribution de tous les dispositifs stériles ou non stériles, des pansements, des ligatures et des sondes, et à partir de 1975 : des seringues à usage unique. L’utilisation de la seringue à usage unique était tellement marginale à l’époque que craignant un usage " détourné ", les responsables n’acceptaient de nous commander des seringues neuves qu’en échange nombre pour nombre des emballages vides : la perte d’un emballage de seringue pouvant être perçu comme la preuve d’un détournement et représentait à elle seule la menace d’un retour sans préavis à la seringue en verre. Les Infirmières en exercice professionnel à cette époque se souviennent du temps passé à classer et à compter les emballages par catégories, sans oublier l’obligation parfois de vider les sacs poubelle pour récupérer un emballage jeté par mégarde et manquant à l’inventaire ! Adieu les grosses boîtes d’instruments et les grands tambours de compresses, adieu la pince à servir, l’alcool à brûler et la boîte d’allumettes, et ouf !…adieu les seringues en verre. Sans le savoir, en Mai 1972, l’ Hôpital de Bourg-en-Bresse a inventé non la Stérilisation Centrale mais la CAMSP, toute ressemblance avec ce qui s’est généralisé plus tard à partir de 1974 dans les établissements de soins n’étant que pure coïncidence ! Tous ces changements ne se sont pas faits sans difficultés : jeter toutes ces boîtes et ces tambours, jeter tout ce matériel après usage, jeter tous ces sachets d’emballage, acheter tous ces instruments en inox en remplacement des instruments en acier chromé, acheter tous ces plateaux en plastique, était de prime abord contraire à des réflexes ancrés d’économie et ont même, disons, échauffé quelques esprits, pas forcément des plus anciens à qui on demandait jusqu’alors de tout faire avec peu, mais d’acteurs de soins qui n’avaient sûrement pas saisi l’importance de l’enjeu. A cette époque, les dispositifs stériles et les pansements ne faisaient pas encore partie du monopole pharmaceutique : c’est " l’ Econome " avec l’accord circonstancié du Pharmacien qui gérait les demandes des unités de soins en matériel à usage unique : époque faste où les " crédits supplémentaires " venaient en Septembre s’ajouter au budget primitif, en quantité nécessaire et (plus que) suffisante pour satisfaire les besoins. Epoque bien heureuse pour les services de soins qui voyaient naître et progresser leurs projets sans même attendre parfois l’approbation des budgets. __

B.M.N Étudiant(e) en Médecine




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 Re : La Stérilisation d’hier à aujourd’hui.

1979 fut une étape importante pour le Centre Hospitalier de BOURG avec l’ouverture de l’ hôpital de Fleyriat : un des derniers hôpitaux construit avant l’apparition des rigueurs budgétaires et un bel outil de travail doté d’équipements de dernière génération dont certains même d’avant garde. Le service de stérilisation centrale ne fut pas oublié dans la distribution : renforcement de l’équipe par 3 postes d’Aides-soignantes et un poste d’Infirmière, superficie du service passant de 20 à 320 m2, service confortablement et entièrement équipé de mobiliers et d’équipements fonctionnels reluisants le neuf. Tout était réuni pour centraliser la stérilisation au bénéfice de l’ensemble des unités de soins de Fleyriat et de celles restées sur l’Hôtel-Dieu, en attente de la construction de la deuxième tranche. Un premier objectif du service fut de proposer aux soignants des sets de soins " prêts à l’emploi " contenant le minimum nécessaire de dispositifs pour un soin donné : un soin = un set. Satisfaire par manufacture cette prestation s’est avéré bien vite du domaine de l’utopie : des industriels du pansement ont été contactés pour nous fournir cette prestation mais aucun a été attentif à notre demande. Les bressans, qui par nature ont la tête dure ne capitulent pas devant les difficultés : de là à considérer le service de stérilisation comme une petite entreprise il n’y a qu’un pas : cette originalité nous a conduit bien vite à l’obligation de mécaniser nos moyens de production. En 1982, le Centre Hospitalier innova en faisant d’une part l’acquisition d’une machine de conditionnement qui nous permit non seulement de faire face aux besoins de fabrication de l’époque mais aussi de prendre en charge en 1984 la stérilisation pour le secteur Mère et Enfant sans effectif supplémentaire, mais aussi, en sous-traitant la stérilisation de cette production à une société utilisant le rayonnement ionisant, procédé de stérilisation ne transformant pas les qualités de douceur et d’absorption des pansements comme l’aurait fait la stérilisation par vapeur d’eau. Le deuxième objectif du service fut " la qualité " : même sans avoir formalisé au départ la démarche, cette préoccupation fut à l'origine de décisions importantes qui plaçaient le Centre Hospitalier de Bourg en bon rang et parfois en précurseur dans la recherche de sécurité apportée au malade et dans la gestion économique des dispositifs : remplacement de tous les matériels creux et tubulaires réutilisables difficiles à nettoyer par de l’usage unique, remplacement des champs en coton pour le drapage chirurgical par du non tissé à usage unique, utilisation de sarraus en microfibre pour l’habillage du chirurgien, etc… Ces deux objectifs se sont encore plus concrétisés avec la construction de la CAMSP en 1994, où, en un lieu unique, sont réunis moyens et compétences pour gérer de façon cohérente la prestation stérilisation et dispensation des dispositifs et des pansements : unité dont la centralisation est presque unique en France et que beaucoup d’établissements nous envient, où la qualité s’est étendue au contrôle unitaire sous loupe éclairante de tous les dispositifs invasifs ou à risque avant d’autoriser son recyclage, à la validation des cycles de stérilisation par un logiciel de supervision des cycles d’autoclave développé en partenariat avec le fournisseur, à une mise en place de la traçabilité, et bien sûr, à la formalisation de la démarche assurance qualité sur la base de la démarche de certification, sans pour autant la revendiquer. Que reste-t-il de ces années soixante ? quelques vielles boîtes, vieux tambours et vieux instruments sur un rebord de fenêtre, témoins du temps passé, et des acteurs, toujours là, bon pied, bon œil, avec encore des projets !

Souvenirs d’un cadre supérieur infirmier à l’hôpital de Bourg-en-Bresse J.P. LOUVET "